Tout commence par une première campagne recommandant de manger « 10 fruits et légumes par jour » en 1999 par l’Association Interprofessionnelle des Fruits et Légumes frais (APRIFEL)1. Au regard de cet objectif si irréaliste et pour tenir compte du Programme National Nutrition Santé (PNNS) publié entre-temps2, le slogan s’est transformé en « de 5 à 10 par jour », tandis que celui du PNNS est « Mangez 5 fruits et légumes par jour ». La campagne de sensibilisation de ce dernier vise à inciter la population française à augmenter sa consommation de fruits et légumes frais, généralement considérée comme insuffisante à couvrir ses besoins journaliers.

Sommaire
L’essentiel
- 5 fruits et légumes par jour = 400 à 500gr de fruits et légumes (1 portion = 80 à 100gr)
- Sur ces 5 portions : la répartition recommandée est 3 de légumes, 2 de fruits
- 400gr de fruits et légumes apportent en moyenne 8 à 12gr de fibres, beaucoup de vitamines et peu de calories
- Cette quantité a un impact conséquent sur la diminution de risque de maladies cardiovasculaires, de certains cancers et de mortalité prématurée
- Intégrer ces portions aux repas habituels au lieu de tout chambouler
Pourquoi « 5 fruits et légumes par jour » ?
Une recommandation fondée sur des décennies d’études
L’objectif des 5 fruits et légumes par jour ne sort pas de nulle part. Il découle d’un large consensus scientifique international, établi après plusieurs décennies d’études épidémiologiques portant sur des millions de participants.
Les chercheurs ont observé qu’à partir d’environ 400 à 500 g de fruits et légumes par jour, le risque de maladies cardiovasculaires, de certains cancers et de mortalité prématurée diminue nettement. Ces résultats appuient les recommandations de santé publique visant à accroître la consommation de fruits et légumes pour la prévention des maladies cardiovasculaires, du cancer et de la mortalité prématurée3.
Au-delà de cette quantité, les bénéfices supplémentaires deviennent plus modestes, ce qui explique la fixation du seuil à cinq portions quotidiennes.4
Les mécanismes biologiques à l’œuvre
Ces effets protecteurs s’expliquent par la composition exceptionnelle des 5 fruits et légumes.
Ils apportent une grande variété de fibres, vitamines, minéraux et composés antioxydants (polyphénols, caroténoïdes, flavonoïdes) qui agissent sur plusieurs fronts :
- réduction de l’inflammation et du stress oxydatif ;
- amélioration du profil lipidique et de la tension artérielle ;
- régulation du microbiote intestinal ;
- effet rassasiant contribuant au contrôle du poids.
L’ensemble de ces mécanismes contribue à une meilleure prévention des maladies chroniques comme les pathologies cardiovasculaires, le diabète 2 ou certains cancers5.
Les fruits et légumes sont des aliments à forte densité nutritionnelle et à faible densité énergétique. Cela signifie qu’ils apportent beaucoup de nutriments essentiels pour très peu de calories.
En moyenne, 100 g de légumes contiennent 20 à 40 kcal, 2 à 4 g de fibres, une grande quantité de vitamine C, bêta-carotène, potassium et des centaines de composés antioxydants (polyphénols, flavonoïdes).
Les fruits, plus sucrés, restent très modérés en énergie (40 à 70 kcal/100 g) et contribuent fortement à l’apport en fibres solubles et en antioxydants naturels.
C’est cette combinaison (peu de calories, beaucoup de micronutriments) qui explique pourquoi ils figurent au cœur de toutes les recommandations nutritionnelles depuis plus de 20 ans.
Les preuves françaises : où en sont les Français ?
En France, les enquêtes nutritionnelles successives montrent que la population reste loin des recommandations.
Selon la dernière étude nationale de consommation (INCA 3), la moyenne est d’environ 3,4 portions de fruits et légumes par jour, bien en dessous des cinq portions préconisées. Seul un quart des adultes atteignent ce repère, un chiffre confirmé par Santé publique France6.
Ce déficit s’explique par plusieurs facteurs : manque de temps, coût perçu des produits frais, méconnaissance des portions, et surtout baisse de la consommation des légumes, notamment chez les jeunes adultes7.
Ces constats ont conduit à inscrire la recommandation « 5 fruits et légumes par jour » au cœur du Programme National Nutrition Santé (PNNS) depuis le début des années 2000.
Elle est reprise dans toutes les campagnes officielles, avec un message simple : « Au moins cinq portions de fruits et légumes par jour, à chaque repas et selon la saison ».
Cette approche vise à renforcer la prévention primaire des maladies chroniques tout en promouvant une alimentation plus durable et plus végétale.
Comment atteindre ses 5 fruits et légumes par jour au quotidien ?
Commencer par revoir la notion de « portion »
Le premier obstacle, c’est souvent la confusion. Une portion, ce n’est pas une montagne de légumes dans l’assiette. En pratique, cela représente environ 80 à 100 g, soit une tomate moyenne, une pomme, deux poignées de haricots verts ou un petit bol de crudités. C’est aussi bien un fruit frais qu’une compote sans sucre ajouté, des légumes surgelés ou même une soupe maison. En revanche, les jus industriels sucrés et les frites ne comptent pas ! L’important est de varier les formes tout en restant dans le végétal brut8.
Intégrer plutôt qu’ajouter
Pour manger plus de fruits et légumes, il ne s’agit pas forcément de révolutionner ses repas, mais d’intégrer plus subtilement le végétal dans ce que l’on mange déjà. Ajouter des tomates cerises, du concombre ou des carottes râpées à une assiette de pâtes change peu le goût mais augmente la densité nutritionnelle du plat. Un fruit au petit-déjeuner ou en collation, une soupe en entrée le soir : ces gestes simples permettent d’atteindre facilement les cinq portions sans avoir l’impression de suivre un régime.
Une journée type pourrait ressembler à cela :
- Dîner : soupe ou poêlée de légumes, accompagnée d’un plat simple
- Petit-déjeuner : un fruit frais ou une compote sans sucre ajouté
- Déjeuner : crudités + légume cuit dans l’assiette principale
- Goûter : un fruit de saison ou quelques morceaux de fruits secs
L’importance de la variété
Au-delà de la quantité, la diversité des 5 fruits et légumes joue un rôle majeur. Varier les couleurs, les textures et les familles végétales permet d’obtenir une plus grande palette de vitamines, minéraux et antioxydants. En changeant régulièrement de produits selon les saisons, on couvre naturellement ses besoins tout en respectant le rythme de la nature.
En France, cette diversité est aussi culturelle : le terroir offre une abondance de choix régionaux. Remettre la saisonnalité au centre, c’est donc redonner du goût à l’équilibre.
- les verts (brocolis, épinards) apportent magnésium, chlorophylle, fer et folates
- les rouges (tomates, fraises) sont riches en lycopène et anthocyanes
- les oranges (carottes, agrumes) fournissent du bêta-carotène et de la vitamine C

Une question d’organisation, pas de volonté
La barrière principale n’est souvent pas la motivation, mais le quotidien. Entre le travail, les enfants, et le manque de temps, la cuisine maison passe parfois au second plan. Pourtant, la plupart des recommandations insistent sur la simplicité : surgelés nature, conserves sans sel ajouté, salades prêtes à l’emploi, tous ces produits comptent. L’enjeu est moins la fraîcheur absolue que la régularité de la consommation.
Quelques stratégies simples :
- Associer les repas traditionnels français : un potage en entrée, un légume en accompagnement et un fruit en dessert couvrent déjà trois portions.
- Préparer à l’avance : éplucher et découper certains légumes le week-end pour les avoir prêts.
- Toujours avoir un “plan B” : un sachet de haricots verts surgelés, une soupe en brique, une pomme dans le sac.
Les erreurs fréquentes : jus, portions, surgelés/conserves
Penser que le jus remplace le fruit entier
Beaucoup imaginent qu’un verre de jus vaut autant qu’un fruit croqué, alors que la réalité nutritionnelle est différente. Les jus 100 % fruits perdent une grande partie des fibres et offrent des sucres «libres» plus rapidement assimilés, ce qui favorise des pics glycémiques et peut, lorsqu’ils sont consommés régulièrement et en quantité, participer à une prise de poids, notamment chez les enfants9. Des revues récentes montrent des associations entre consommation régulière de jus et gain de IMC chez l’enfant10 ; chez l’adulte les données sont moins nettes mais suggèrent qu’un verre par jour doit rester l’exception plutôt que la règle.
Les recommandations publiques limitent généralement la contribution des jus à une seule portion par jour au maximum et privilégient le fruit entier pour les autres portions11.
Confondre portion, quantité et « sensation », la fausse petite portion
La notion de portion (≈80 g) est simple sur le papier mais peu intuitive en pratique. Beaucoup sous-estiment la taille d’une portion : une poignée de raisins, un bol de salade ou une tomate moyenne comptent pour une portion. Des enquêtes comportementales et qualitatives montrent que le public se déclare souvent informé du message «5 fruits et légumes par jour» mais ne maîtrise pas les détails. Cette méconnaissance se traduit par des réponses erronées dans les sondages et par des estimations surestimées de sa propre consommation. Un repère visuel simple (poing, cuillère, bol) ou des messages clairs sur le format des portions augmentent l’adhésion et la précision des auto-déclarations12.

Croire que seuls les produits «frais» comptent et négliger surgelés et conserves
L’idée reçue veut que seul le produit fraîchement cueilli soit «vraiment bon», mais d’un point de vue nutritionnel ce n’est pas systématiquement vrai. Les procédés modernes (blanchiment puis surgélation à la récolte) conservent une grande partie des vitamines et des composés bioactifs ; parfois un légume surgelé acheté au pic de maturité contiendra plus de vitamine C qu’un produit frais stocké plusieurs jours. Les conserves, lorsqu’elles sont sans sel ni sucres ajoutés, constituent aussi une alternative valable, surtout pour limiter le gaspillage et maintenir une consommation régulière. Les pertes nutritionnelles varient selon l’aliment, le nutriment et le procédé, mais utiliser surgelés ou conserves intelligemment permet d’augmenter facilement la consommation quotidienne sans sacrifier la qualité13.
Conclusion : vers une alimentation du bon sens
Au-delà du repère « 5 fruits et légumes par jour », c’est une philosophie de vie qui se profile : celle d’une alimentation qui allie plaisir, santé et respect de notre environnement. L’idée n’est pas de suivre une règle stricte à la lettre, mais de revenir aux fondamentaux: manger davantage végétal, varier les couleurs, privilégier le local, et faire de chaque repas une occasion de faire du bien à son corps.
Le message se décline concrètement : ajouter une portion là où il en manque, choisir une couleur nouvelle, préférer un légume à un snack transformé. Chacun de ces “petits pas” a une valeur réelle. On sait par les études que même passer de trois à quatre portions par jour diminue déjà significativement les risques de maladies cardiovasculaires ou de cancer14.
En France, ce repère rencontre encore des défis : accessibilité, connaissances sur les portions, habitudes ancrées dans l’usage d’aliments ultra-transformés. Mais ces obstacles ne sont pas insurmontables. Les politiques de santé publique, les stratégies alimentaires durables et la mobilisation des filières locales montrent la voie vers un changement concret.
Finalement, manger “5 fruits et légumes par jour” revient à faire le choix d’être acteur de son alimentation, mais aussi de l’avenir de la planète. Une assiette plus végétale, plus diversifiée, c’est une respiration pour nous et pour les générations futures. Ce n’est pas la quantité parfaite qui importe, mais la démarche, la constance, le plaisir retrouvé autour de la nourriture. En adoptant ce cap, on redonne du sens à ce que l’on met dans son assiette.
- Site internet de 10parjour.net ↩︎
- PNNS, 2006, Deuxième Programme national nutrition santé 2006-2010 ↩︎
- International Journal of Epidemiology, 2017, Consommation de fruits et légumes et risque de maladies cardiovasculaires, de cancers et de mortalité toutes causes confondues ↩︎
- OMS, 2018, Healthy diet ↩︎
- OMS, 2023, Increasing fruit and vegetable consumption to reduce the risk of noncommunicable diseases ↩︎
- Programme National Nutrition Santé, 2019, État des connaissances sur l’état nutritionnel, la consommation alimentaire en France ↩︎
- INTERFEL, 2023, Bilan de consommation 2023 ↩︎
- British Dietetician Association, 2025, Fruit and vegetables – how to get 5-a-day ↩︎
- Nutrition Bulletin, 2025, Fruits entiers versus 100% Jus de fruits: revisiter les preuves et ses implications pour les recommandations alimentaires saines des États-Unis ↩︎
- Jarma Pediatrics, 2024, Consommation de jus de fruits 100 % purs et poids corporel chez l’enfant et l’adulte ↩︎
- NHS, 2022, 5 A Day: what counts? ↩︎
- British Dietetician Association, 2021, What is a portion of food? ↩︎
- Journal de la composition et de l’analyse des aliments, 2017, Analyses nutritionnelles sélectionnées de fruits et légumes frais, conservés frais et congelés ↩︎
- European Journal of Nutrition, 2023, Impact environnemental et qualité nutritionnelle de l’alimentation des adultes en France, d’après la consommation de fruits et légume ↩︎